EXCLU. L’ancien skieur alpin français, vice-champion du monde de slalom et de combiné en 2009 à Val d’Isère, s’est longuement confié pour Le Petit Montagnard à l’occasion des Sportel Awards, dont il était l’invité.
C’est un Julien Lizeroux tout sourire qui s’est présenté devant nous. L’occasion d’échanger sur son après-carrière, l’équipe de France de ski alpin, tout en faisant le point sur l’état de nos montagnes et nos stations de ski.
Comment gérez-vous votre après-carrière ?
Julien Lizeroux : J’habite toujours à la montagne. Je suis né en montagne (Moutiers), j’ai toujours habité entre Albertville, La Plagne et Le Grand-Bornand. J’ai beaucoup voyagé durant ma carrière, mais c’est ici que je voulais faire ma vie. Mon actualité, elle, n’est pas très riche (sourire).
Je profite beaucoup de la montagne l’été, entre les activités en plein air et le sport. Lors de la saison hivernale, je suis occupé en tant qu’ambassadeur (Bollé, Sun Valley, Salomon, Team ESF). Je fais de la promotion et des shootings pour mes partenaires. Je suis beaucoup sur les skis, c’est ce qui me plaît. Je fais également de l’évènementiel. Avec des copains, nous organisons le Super Slalom à La Plagne.
Continuez-vous à suivre et à encourager les équipes de France de ski alpin ?
Julien Lizeroux : J’ai toujours été un grand fan de tous les sports en général. J’ai le coeur brisé depuis l’élimination de l’équipe de France de rugby à la Coupe du monde. Bien sûr, je reste un fervent supporter des équipes de France de ski. Nous traversons une période difficile. Les finances ne sont pas au beau fixe. C’est dommage, car nous restons sur un championnat du monde en France qui s’est parfaitement bien déroulé.
L’intérêt pour la montagne l’été a toujours existé pour la diversité de ses activités en plein air. Mais le problème, c’est que dans l’esprit des gens, la montagne, c’est l’hiver, et la mer, c’est l’été.
Julien Lizeroux
Avec les bons résultats que nous avons depuis vingt ans, c’est dur à encaisser pour cette génération. Les autres Fédérations en face ont tellement plus de moyens. C’est dur pour la jeune génération. Mais c’est un problème qui est général en France. Nous ne sommes pas une nation de sport, ce n’est pas la priorité. Il faudrait que les pouvoirs publics prennent conscience que le sport est un vrai critère de réussite social, un beau vecteur de communication et une solution pour la santé publique.
Le tourisme en montagne a connu cet été une croissance de 2%. Comment poursuivre sur cette dynamique et convaincre les touristes que la montagne est aussi estivale ?
Julien Lizeroux : L’intérêt pour la montagne l’été a toujours existé pour la diversité de ses activités en plein air. Mais le problème, c’est que dans l’esprit des gens, la montagne, c’est l’hiver, et la mer, c’est l’été. Ils n’y dérogent pas vraiment. Pourtant, la montagne en été, c’est magique.
Les paysages, le grand air, les activités… En automne, les couleurs sont magnifiques. Quand on aime mettre le nez dehors, la montagne n’est pas loin d’être le paradis. C’est pour cela qu’il faut insister et communiquer sur une montagne quatre saisons.
Est-ce la volonté des pouvoirs publics ?
Julien Lizeroux : Il ne faut pas se leurrer, l’essentiel du business se fait en hiver. En été, c’est difficile. J’habite au Grand Bornand avec ma femme, les commerçants sont ouverts tous les jours, mais en ce moment, il n’y a personne. Ils travaillent, mais à perte. Tout est compensé grâce à la saison hivernale. Il ne faut pas oublier que nous sommes la deuxième destination mondiale en terme de skieurs par an derrière les États-Unis avec 50 millions de journées de ski achetées.
Comment optimiser encore davantage la saison hivernale ?
Julien Lizeroux : On remarque depuis plusieurs années que l’arrivée de la neige est plus tardive. La saison de ski, ce n’est pas que du 15 décembre au 15 mars. Au printemps dernier, nous avons eu des conditions exceptionnelles avec de la vraie neige d’hiver. Et il n’y avait personne sur les pistes ! Il faut faire prendre conscience aux gens que la saison de ski ne s’arrête pas au mois de mars. À 2000 mètres, il y a de la neige jusqu’à fin avril. C’est une période idéale pour skier, avec moins de monde sur les pistes et des jours qui rallongent.
Certaines stations de basse altitude ont déjà pris d’autres trajectoires. C’est le cas de La Clusaz et de Morzine qui sont devenues des stations références pour le VTT.
Julien Lizeroux
On entend souvent parler de réchauffement climatique, de neige en danger dans les années à venir. Qu’est-ce que cela vous inspire ?
Julien Lizeroux : J’ai vu l’évolution durant toute ma carrière. Certains glaciers où je me rendais dans les années 1990 ont perdu parfois par endroits près de 100 mètres de glace. C’est une réalité que l’on ne peut pas omettre. Mais de là à dire qu’il n’y aura plus de neige dans dix ans, je n’y crois pas du tout. Les stations de basse altitude seront impactées, mais à 2000 mètres, il y aura toujours de la neige.
Surtout avec l’utilisation des canons à neige, souvent décriés…
Julien Lizeroux : Il y’a les pros et les anti neige de culture. Il faut savoir que la neige artificielle n’est ni plus ni moins que de l’eau et du froid. Quand la neige fond, elle redevient de l’eau.
Il n’y a pas d’additif, contrairement aux idées reçues. En Suisse, l’eau est directement pompée dans les barrages et y retourne une fois la fonte des neiges.
Que conseillez-vous aux stations de basse altitude, les plus menacées par le changement climatique ?
Julien Lizeroux : Certaines stations ont déjà pris d’autres trajectoires. C’est le cas de La Clusaz et de Morzine qui sont devenues des stations références pour le VTT depuis dix, quinze ans. De juin à fin septembre, elles font le plein. Les gens dévalent les pistes en VTT avant d’aller à la piscine, au tennis ou autre. La montagne n’est pas moins festive que la mer. Le terrain de jeu est illimité. On peut le voir à Tignes, qui a énormément développé ses autres activités avec de magnifiques installations, qui reçoivent régulièrement les équipes nationales dans plusieurs disciplines.