Bourg Saint Maurice – Les Arcs – À La Thuile de Vulmix, sur les hauteurs de Bourg Saint Maurice, puis l’été dans la vallée des Chapieux, Aline et Mathieu Michaud-Ruaz mènent une existence rythmée par les saisons, la traite, les foins et les marchés. Une vie rude mais choisie, bâtie autour de leur bergerie, La Fya, où quelque 180 bêtes – brebis, agneaux et béliers – dessinent un paysage de plus en plus rare : celui d’une agriculture familiale, raisonnée, ancrée dans son terroir.
C’est en 2022 que le couple, originaire de la vallée, a définitivement basculé vers ce mode de vie. Aline travaillait à l’ADS (Domaine de montagne Les Arcs / Peisey-Vallandry), Mathieu était responsable maintenance sur le domaine skiable des Arcs.
Lui, avait déjà un petit troupeau depuis 2009, en parallèle de ses fonctions. « Un jour, alors que j’étais en congé parental pour notre fille Jeanne, il m’a lancé : ‘Soit on reste là, soit on se lance à temps plein avec les brebis’. J’ai dit go » raconte Aline, encore de l’émotion dans la voix.


Depuis, les journées démarrent à 4h30. À cette heure-là, Mathieu monte à l’alpage pour la première traite. « Une fois le lait tiré, on lance la fabrication. La tome, les frais, les yaourts, les crèmes dessert… On adapte selon la production du jour, environ 100 litres par jour avec nos 94 laitières » détaille-t-elle. Pendant que le caillé prend, les brebis, elles, partent paître seules, encadrées par les chiens de protection.
La fromagerie est installée directement sur les hauteurs des Chapieux, dans une ancienne chèvrerie que le couple a transformée en bergerie. L’hiver, retour à La Thuile de Vulmix pour continuer la fabrication. Ici, tout est fait maison : le lait, les yaourts, les tommes, le persillé… et même les foins. « On est 100 % autonomes. Les brebis ne mangent que ce qu’on fauche sur Bourg Saint Maurice et Vulmix » précise Mathieu.
Des brebis, des marchés et des valeurs
Le quotidien est exigeant, le rythme soutenu, mais le couple ne regrette rien. « C’est ce qu’on cherchait : une vie plus proche de la nature, plus cohérente. Et même si on fait peu de volume, tout est raisonné, maîtrisé. »
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À la bergerie, pas d’industrialisation, mais une diversité de produits artisanaux et des ventes en circuit court : à la ferme, sur les marchés de Bourg Saint Maurice, de Val d’Isère l’hiver, et aux rendez-vous estivaux des producteurs. « On a de la chance, les gens jouent le jeu, reviennent, nous font confiance » souffle Aline. Le bouche-à-oreille fonctionne, renforcé par une présence sincère et régulière auprès des habitants comme des vacanciers.


Mais tout n’est pas toujours simple. Il faut gérer les à priori sur les chiens de protection, les craintes autour de leur présence, les randonnées qui croisent les troupeaux, les chaleurs qui repoussent la sortie des bêtes à la nuit tombée. « Les brebis, tant qu’il fait chaud, elles ne mangent pas. Donc on les laisse le plus tard possible, souvent jusqu’à 21h. Et elles redescendent d’elles-mêmes, encadrées par les chiens. »
La passion, la patience et le respect des cycles rythment cette petite exploitation qui s’est fixée une ambition claire : rester à taille humaine, transmettre les savoir-faire de la vallée, et produire autrement. « On a même repris une recette locale de fromage au lait de brebis qui était à la base une adaptation de la tome de chèvre tarentaise. C’est un clin d’œil au passé et une manière de prolonger la tradition. »