Bourg Saint Maurice – Les Arcs – Bien avant l’essor des stations de ski et des sports d’hiver, la vallée de Bourg Saint Maurice avait une toute autre économie : l’agriculture et le commerce itinérant. « On oublie souvent que notre territoire était d’abord un lieu de passage, stratégique depuis l’Antiquité », rappelle Jean‑Marie Chevronnet, guide‑conférencier pour Les Arcs Bourg Saint Maurice Tourisme. « Une route romaine reliait déjà Vienne au Piémont italien. »
L’élevage, centré sur la vache tarine, donne naissance à un produit phare : le Beaufort. Ce fromage à pâte dure, aujourd’hui AOP, était alors façonné en meules gigantesques de 80 à 90 kg.
« Il fallait presque 900 litres de lait pour en produire une seule. C’était une production collective : chacun apportait son lait aux fruitières, ancêtres de nos coopératives » explique le guide.
Un fromage comme monnaie d’échange
Ce Beaufort, on ne le consommait pas forcément sur place. « C’était une monnaie d’échange. Les colporteurs chargeaient les mules et partaient vendre ces meules à Lyon, à Paris, jusqu’en Italie. En retour, ils ramenaient argent et marchandises introuvables en vallée. »
- LIRE AUSSI : « Une architecture révolutionnaire » : retour sur la création des Arcs, un laboratoire moderne en pleine montagne
Cet esprit collectif allait bien au‑delà de la production laitière. Une partie des revenus des ventes alimentait une caisse commune. « Elle servait à aider une famille après un incendie, une maladie ou une mauvaise récolte. C’était une véritable économie solidaire, née des contraintes de la montagne » souligne Jean‑Marie Chevronnet.
Avec l’arrivée du train en 1913, l’économie agricole décline au profit du tourisme. Mais le Beaufort n’a pas disparu : il est devenu un symbole. Aujourd’hui encore, il rythme les alpages d’été et inspire une fierté locale intacte. « On dit souvent que le Beaufort est l’or de nos montagnes. Et, d’une certaine façon, il l’a toujours été » conclut le guide.